Mais qu’est que c’est que ça ? Notre première fleur n'a été obtenue que très récemment ; comment a-t-on pu commettre une telle faute de goût, qui mérite un retrait immédiat de cette distinction ? Et devrons-nous supporter cette horreur jusqu’aux chrysanthèmes ? Dans ce cas, voilà bien un motif pour fuir cette ville infâme ; rejoignez-moi, nous serons les premiers exilés floraux.
On nous en a fait une belle longueur, en pensant peut-être que la chétive touffe de de graminées qui ponctue le coloriage suffirait à arranger les choses !
Et un peu plus loin ? L'idée est la même : gravillons et pouzzolane remplacent les paillettes de lin, et ici ou là une plante maltraitée végète au milieu d'une rondelle criarde.
Calmons-nous, ce massacre a sûrement une justification. Lubie de nos édiles ? non, ça paraît impossible, de mémoire de démocrate ça ne s’est jamais produit. Peut-être a-t-on supprimé des emplois chez les jardiniers, pour les remplacer par quelques barbouilleurs et manutentionnaires moins bien payés ? Mais non, cela ne figurait pas dans les engagements de campagne.
Devant le kiosque à musique d'avant-garde, les herbes envahissent les plantations, mais c'est sûrement pour préserver la biodiversité, comme chez une voisine qui, elle, apporte les précisions utiles.
Ou bien il s'agit simplement de faire des économies d'eau. Mais dans ce cas, que font nos voisins, et pourrons-nous nous réfugier chez eux ?
Dans cette commune, on cède aussi à la mode du jardin sec, avec son sempiternel pont enjambant un ru pierreux. Mais on fait aussi dans la tradition (et le slogan ridicule), avec la suspension de pétunias. C'est un peu mieux, mais insuffisant pour nous délocaliser.
Ici, c'est flagrant, on veut éblouir le curiste. Mais à mon goût c'est trop parfait, presque artificiel.
Là, c'est de la triche, on a carrément engagé un porteur d'eau.
D'ailleurs, il ne s'est pas foulé : il s'est contenté de vider le bassin à ses pieds. Et maintenant, il ne fait plus que de la figuration !
Et nous voilà complètement déboussolés,
mais la solution est sans doute ici.
Bien sûr, nous n'échappons pas au décor minéral, complété par son indispensable pont, mais le souci de créer une composition harmonieuse est évident, et nous profitons d'une belle production de légumes (peut-être un peu pollués par les gaz d'échappement).
Oui, c'est ce dernier décor que je préfère. Mais est-ce une raison suffisante pour déménager ? Il serait peut-être plus sage d'attendre un peu, en cultivant notre jardin.